合気道の冬

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samedi 8 octobre 2016

Budo, Bujutsu, la même racine



Plus le temps passe, plus mes questions trouve des réponses. Et ces réponses donnent naissance à de nouvelles questions.


C’est un cycle infini, un peu comme un escalier ou chaque marche gravie nous donne une vision de plus en plus aérienne, ce qui donne une dimension de plus en plus grande à ce que nous observons ou étudions.

A chaque fois que je pose les pieds sur un tatami une question revient :

« Pourquoi ? »

Cette simple question permet de décoder et comprendre beaucoup de choses en nous et autour de nous.

Arrivé au sommet de la maîtrise technique maître Ueshiba s'est plongé profondément dans la religion et a trouvé ce qu’il nommait « le divin en lui ». Il disait aussi "La véritable nature du Budo est l'amour".

Ce n’est pas forcément évident de voir l’esprit de cela dans des arts de guerre. La plupart d’entre nous sont certainement arrivés dans la pratique des Bujutsu ou Budo dans l’objectif d’obtenir quelque chose personnellement…. C’est avec le temps et le questionnement que notre regard sur notre pratique change et nous amène à voir la vraie nature des choses.

Passer à l’enseignement a aussi une part importante dans ce chemin, car cela nous donne un regard exceptionnel dans notre apprentissage. L’autre, l’élève, devient le miroir de notre propre regard sur notre pratique. Comme le dit si bien l’adage « on juge un arbre à ces fruits », l’élève est le reflet de son enseignant.

C’est le principe même de l’énergie « nous sommes Un », l’autre n’est qu’une part de nous-même. C’est lorsque l’on a compris cela que le mot « Amour » prend un sens. Car la pratique nous amène bien plus loin que notre propre personne . Quand l'égo dirige, les arts martiaux deviennent des sports de combat ou de parade, ni Budo, ni Bujutsu, ils se vident de leur essence.

Le temps est notre ligne d’existence terrestre. Pourquoi la perdre à faire la guerre ? Car même si je suis plus fort techniquement ou physiquement, la maladie, la vieillesse, un empoisonnement, un accident et bien d’autres choses feront que la mort viendra un jour m’emporter comme celui qui me fait face. Nous ne sommes que des hommes à la recherche de réponses sur notre existence et notre chemin ici-bas.

Tamura sensei était déjà atteint d’un cancer quand j’ai débuté la pratique de l’Aikido et il n’a pas arrêté, il a pratiqué jusqu’à sa mort. Il ne combattait pas, il montrait un chemin.
 Une de ces phrases me revient :

« Si vous pratiquez pour gagner un combat, il vaut mieux apprendre à se servir d'une arme à feu. La question est de savoir ce que l'on recherche dans la pratique. »

Toshiro Suga lui dit « Le Budo est une voie de purification. C’est le misogi haraï. Ce n’est pas une voie de destruction de l’adversaire. C’est une voie qui est au-delà de la victoire et la défaite ».

Pour certains, les Bujutsu et les Budo ne sont pas la même chose.  Mais pourtant, ils ont la même Racine qui est le BU.  Et nous même en tant qu’Humains avons la même Racine. Peu importe qu’elle soit vue sous un angle technique ou sous celui du chemin, nous partons et parlons des mêmes choses.

Si sur le tatami nous comparons la qualité de notre pratique à celle de l’autre, si nous le jugeons, nous perdons le sens de ce que peut nous apporter cet échange avec l’autre et ce regard sur nous même que nous aurions dû venir chercher. 

L’art martial alors n’a pas plus de valeur qu’un sport de combat. Ni Budo , ni Bujutsu, il n’est plus que parade. 

 Seul celui qui va en paix vers l’autre peut la trouver en lui, sur le tatami aussi.

mercredi 7 septembre 2016

Aiki d'Ueshiba, Aunkai d'Akuzawa, chemins martial, chemins de vie





Il y a peu, plongé dans ma réflexion sur le corps et sa place dans la pratique martiale, j’ai retrouvé un texte peu connu de Morihei Ueshiba : le texte parlant du Shochikubai.

C’est à la suite de cette expérience qu’O Sensei a arrêté l’entrainement de l’Aiki qui était jusque-là son outil principal de travail.

En le relisant j’ai été interpellé par le fond du texte, au-delà du récit de l’expérience mystique, c’est très proche du chemin de recherche et de travail d’Akuzawa Sensei.
Les deux parlent d’un travail intérieur, d’une force intérieure, chacun avec ces mots et ces expériences de vie, mais le point commun dans la direction demeure.

Akuzawa Sensei m’a dit un jour « cela fait bien longtemps que je n’utilise plus mes muscles, c’est pour cette raison que je ne m’échauffe plus » et il suffit de l’observer sur le tatami pour sentir agir la force qui jaillit de lui. Ueshiba, de son temps, insistait beaucoup sur ce phénomène de jaillissement des techniques que l’on retrouve chez Akuzawa. 

Akuzawa parle beaucoup du « travail sur soi » tout comme Ueshiba qui lui en parlait avec des réferences et des pratiques de la religion shinto comme par exemple le « misogi » (la purification du corps sous une cascade).

Nobuyoshi Tamura racontait que lorsqu’il étudiait avec O sensei, alors qu’il était jeune, que 50 années les séparaient et que leurs centres d’intérêts étaient différents, il ne s’intéressait pas du tout à la philosophie de O sensei ni à la pratique du Shintoisme.

Comme tous les jeunes, disait-il, ce qu’il voulait, s’était développer sa force physique en découvrant les mystères  de la puissance que cachait l’Aikido de Ueishiba. Devenu vieux à son tour, il comprenait pourquoi O Sensei s’intéressait à ces sujet et ce qu’il essayait de leur faire apprendre : comment au travers de l’aïkido, ils pouvaient se défaire de leur illusions pour commencer à découvrir leur réalité sans laquelle la force ne peut jaillir.

田村信喜


Mais il est difficile de faire entendre cette voix là parce qu’il y a toute cet aura de mysticisme, de spiritualité, qui dérange. 

Le témoignage de Tamura Sensei en est une preuve car, au delà de l’âge, je pense que c’est avant tout un problème d’état d’esprit. 

Et pourtant, tout ceci c’est le Ki, l’énergie. L’énergie est harmonie, elle est la réunion des contraires, de la force et de la douceur, de l’ombre et de la lumière, de la volonté d’être et d’être ce que l’on est réellement. 

Pour parvenir à utiliser le Ki, il faut parvenir à être en harmonie avec ce qui nous entoure et donc nous.

L’Aunkai ne propose pas un travail de musculation ou de formation du corps pour obtenir un résultat optimal. Il propose un travail de prise de conscience qui passe par des mouvements demandant un ressenti intérieur qui va en s’approfondissant et qui dépasse la structure physique.

Le « travail sur soi » d’Akuzawa que l’on retrouve dans la voie de l’Aiki d’Ueshiba, c’est un travail de transformation de l’être intérieur, de sa capacité à dépasser son corps, cerveau compris, pour passer à son esprit, son « âme ».



L’expérience que vit O sensei dans ce texte c’est cela
Ce travail vise à oublier l’égo (être le meilleur, le plus fort) pour devenir soi, pour pouvoir ressentir combien la force est inutile quand la perception de l’énergie, du ki, est présente.

Quand l’être parvient à résoudre ses conflits intérieurs, ceux qui l’amènent aux conflits extérieurs, il peut oublier la volonté, il cesse de se poser des questions, il atteint le «ne pas penser » que Tamura Sensei prêchait sur les tatamis.

Le travail sur la force intérieure, sur soi, qui amene à la perception et à l’utilisation de l’énergie est un travail transversal en art martial, il est la force et l’incontournable intérêt de l’Aunkai.


Tenir l’équilibre des Tanren ne demande pas d’être musclé ou simplement de chercher à tenir l’équilibre, il demande à pouvoir ressentir l’axe qui nous relie du ciel à la terre, axe qui dépasse les axes corporels.

Akuzawa Sensei aime particulièrement travailler dans la nature. Dans la nature on peut ressentir l’harmonie, l’énergie qui sous-tend tout.


Morihei Ueshiba n’a pas eu le temps de partager sa compréhension de la profondeur de l’aiki et de sa voie, Akuzawa Sensei le fait, par le geste, avec peu de mots, mais dans ces mots, chacun prend son sens, qu’il ne faut pas altérer, chose hélas rendue difficile par les traductions et les mauvaises compréhensions.



L’Aunkai est un chemin de vie autant qu’un chemin martial, parce que l’art martial vu par Akuzawa Sensei comme il était vu par Ueshiba, n’est pas un art de combat mais un art de paix.



On ne voit bien qu'avec le cœur. L'essentiel est invisible pour les yeux. 
Antoine de Saint-Exupéry
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Note : Les carnets de Takemusu Aiki, Vol. 1, « le corps et le sabre selon Ueshiba Morei », pages 37-39. Editions du Cenacle.


samedi 27 août 2016

Art Martial : Passer de la surface à la profondeur




Suis-je ce que je pense ou ce que ressens ?

En art martial la question peut se poser.

Les maitres du passé, grand samouraïs ou moines au fond des monastères ont développé des savoirs dont il ne nous reste que quelques techniques. Mais derrière il y avait et il devrait encore y avoir bien plus.

Notre pensée nous dirige, elle influence notre façon d’être mais elle peut aussi nous enfermer, sur le tatami entre autres, dans le geste.

L’énergie est libre, elle appartient à tout le monde, elle ne dirige pas, elle ne modèle pas, elle n’enferme pas, sur le tatami elle ne ferme pas le geste
Sa découverte et sa compréhension peuvent se faire de de multiples façons. 

Akuzawa Sensei est un exemple parfait. Dans son étude des art martiaux, son parcours de vie, il est arrivé à cette rencontre de l’énergie (Ki) qu’il nous transmet par son langage, celui de l’Aunkai : pas de mots ou si peu, et au-delà des gestes, la perception, le ressenti qui fait naitre le geste juste.

La base de son enseignement, ce sont les Tanren. Et si on les observe autrement que comme des gestes à répéter encore et encore pour obtenir la position parfaite, on découvre en eux tout un chemin de perception qui va au-delà du mouvement des muscles et des articulations. Les Tanren vus par un danseur de ma connaissance sont une danse libre du corps, ils l’animent, le délient, ils sont une porte de circulation de l’énergie en soi.

L’énergie (le Ki, le t’chi…) fait peur, car elle est l’inconnue de notre être. Et lorsque l’humain a peur, il cherche à abattre. Dès que nous creusons en nous, la peur nous gagne, car nous ignorons ce que nous allons trouver au bout de cette recherche.

Le moyen de contrer cette peur c’est d’être comme l’enfant qui découvre les choses tout simplement. Il les vit, il les expérimente, il les ressent, il ne cherche pas à les maitriser, ni à réussir de suite. Le temps n’a pas de prise sur lui, c’est pour cela que ses progrès sont si extraordinaires.

Demeurer dans cet esprit de découverte c’est la clé des plus grands maitres d’arts martial.
Akuzawa Senseï fait partie des grands maitres de notre époque. D’année en année il fait des bons dans l’approfondissement de sa pratique car il est en recherche perpétuelle. Il ne s’arrête pas au geste, pas à sa perfection, pas au corps, il cherche toujours plus loin dans la perception. 



Il y a peu un ami instructeur m’a dit qu’il croisait beaucoup de pratiquants de longue date de divers arts martiaux qui tenaient le même discours « on en a assez de la technique, on voudrait du fond » 
Le fond que recherche tant de pratiquant peux se trouver, Car il n’est pas une technique, il est ce qui l’anime, il est ce que nous sommes. 

Akuzawa Sensei le dit « il faut travailler sur soi ».

Le travail sur soi n’est pas un travail physique ou technique mais un travail personnel, intérieur, sur notre façon d’être et d’aborder les choses, de les regarder ou encore de les sentir. 

En passant de la quête du geste parfait, techniquement ou efficacement, à la recherche du ressenti on arrive à la « racine dorsale » des arts martiaux, à leur base, à la profondeur tant recherchée.

Akuzawa  Sensei a mis à jour cette colonne vertébrale, il n’a pas créé l’Aunkai comme un art martial de plus, mais comme un  lien entre tous. Il a mis à jour et affine en permanence ce qui est le lien entre tous, l’axe qui fait tout tenir debout : une colonne composée de gestes pour ressentir, de travail sur la perception, de soi, de l’autre, de ce qui relie les partenaires ou adversaires, et dans lequel l’Energie, élément longtemps gardé secret parce que mal compris,  mal interprété, et autorisant une telle puissance que mal utilisé il peut être dangereux, prend toute sa place.

L’Aunkai est un excellent outil pour approfondir la pratique de ceux qui en ont assez de la technique et pour comprendre en ressentant, ce que Energie (KI) veut dire en art martial et ce qu’elle apporte.

Découvrir l’Energie en s’aidant de l’Aunkai, on en reparlera bientôt.

L’essentiel est invisible pour les yeux  

mercredi 20 juillet 2016

Aunkai : Le ressenti, le passage de la porte


L’un des pas les plus importants dans la compréhension de l’énergie c’est le développement du ressenti afin de pouvoir capter et saisir la nature et le mouvement des choses qui nous entourent et qui nous composent

Dans les arts martiaux c’est un élément trop souvent oublié, mis de côté voir occulté par manque de compréhension.


C’est indispensable pour progresser et pénétrer au cœur de l’Aunkai.

Pour travailler ce ressenti, Akuzawa Sensei nous a transmis l’exercice suivant :  c’est la pression ou la non pression qui guide le partenaire. L’exercice peut être fait les yeux fermés aussi. 

Oublier son cerveau et juste ressentir permet de suivre sans peine les mouvements de celui qui fait face. Et celui qui guide lorsqu’il est dans le ressenti a la légèreté de la plume, il fait passer l’énergie dans la main de celui qu’il dirige. 

L’exercice est bien plus difficile qu’il ne semble et il permet de travailler cet élément essentiel : ressentir l’énergie, s’y fondre.

Christophe Ksiazkiewicz "Kiaz"

Une des difficultés pour bien le réaliser vient de de notre enfermement dans les limites du corps physique. Les pratiquants demeurent dans l’attente d’un signal de leur propre corps pour bouger. 

Ils « intellectualisent » au lieu de ressentir. Ils se contractent dans l’attente au lieu de relâcher totalement sans attente, la perception suffisant à enclencher le mouvement.

Afin de développer nos perceptions il n’y a pas de secret : il faut les travailler.
Si on prend l’exemple du chat : il est immobile, et pourtant il sent, sait à quel moment l’oiseau va être accessible, en confiance, il ne bondit ni avant ni après.

Cela me rappelle l’histoire de Neko no myojutsu la merveilleuse technique du chat qui dit bien que c’est dans la non volonté que l’on accomplit le mieux l’action.

Ce mélange de tout ce qui est dans une unité qui dépasse nos limites physiques et visuelles on le retrouve entre autres dans la philosophie indienne. La réalité, ses dieux, son cosmos, ses créatures sont une unité fondamentale.

Dans la philosophie de L’Advaita  वेदान्त, qui siignifie « non deux » on trouve un texte tamoul , Ellâm Onru (« Tout est Un ») qui commence ainsi :

1. Tout, incluant le monde que tu vois, ainsi que toi-même, le témoin du monde, tout est Un.

2. Tout ce que tu considères comme étant moi, toi, lui, elle, et cela, tout est Un.

3. Les êtres sensibles, ainsi que l’inerte et l’insensible (la terre, l’air, le feu et l’eau), tout cela est Un.
    Le texte dit aussi que l’unité du monde a une multitude d’aspects reliés les uns aux autres. 

Son troisième enseignement est la dimension énergétique. Si tout est Un, et si tout est relié, on peut dire aussi que tout est énergie que les hindous appellent prana. 

Pour comprendre et appréhender ce ressenti, il suffit de se mettre en pleine nature et de fermer les yeux pour nous déconnecter du monde physique environnant, ceci dans le but de ressentir toute les choses qui nous entourent afin de nous habituer à sentir ces choses sous leur forme énergétique et non physique.



La nature est le meilleur terrain de jeu et d’entrainement qu’il peut nous être donné pour avancer dans notre découverte du ressenti pur. 

En travaillant cet angle d’approche, le pratiquant peut accéder à l’enseignement profond de l’Aunkai, qu’encore trop de pratiquants trouvent hermétique parce qu’ils demeurent à la porte que nous ouvre Akuzawa Sensei.

Celle qui nous permet de transformer notre perception du corps, nos sensations, nos réactions, notre vision du monde et de nous-même.

L’Aunkai est un Bujutsu de transformation profonde. Il met en jeu ce qu’il y a de plus subtil en nous pour nous permettre cette transformation et le ressenti en est un fil conducteur essentiel.
 

"L'essentiel est invisible pour les yeux"